La Wikimedia Foundation traverse en ce moment quelques turbulences, un de ses cadres (Erik Möller) étant accusé de tendances pédophiles par un site américain. Bien évidemment, l'écho de
ces remous est parvenu dans le
Bistro de Wikipédia.
Avec quelques approximations bien senties, mais aussi recadrées par d'autres utilisateurs, bien plus prudents et plus respectueux de la présomption d'innocence, l'affaire n'ayant pas encore de
développement judiciaire réel. Je précise que je n'avais pas l'intention d'intervenir sur le fond de l'affaire - et je n'ai
toujours pas l'intention de le faire - mais que je préfère
mettre en vis-à-vis deux billets de la blogosphère. Deux billets très différents.
Le premier est bien sûr une montée en épingle de l'observatrice de Wikipédia, autoproclamée juge et partie. Et elle n'y va pas avec le
dos de la cuillière, c'est le moins que l'on puisse dire. Billet auquel "riposte" (je doute que cela soit une
réponse à Alithia, en fait) illico David Monniaux sur son blog, dans un billet intitulé
Bal tragique à San Francisco, avec un argumentaire intéressant, et qui, lui, ne procède en
rien d'un procès à charge ou à décharge de l'utilisateur mis en cause dans l'affaire. J'invite le lecteur à comparer les deux billets, tant du point de vue stylistique qu'argumentaire. Je
m'attendais, pour ma part, à quelque chose de plus construit de la part d'Alithia, qui se présente comme professeur de philosophie. Et (si on suit les idées d'Alithia), de beaucoup moins
pertinent de la part de David Monniaux, qui n'est qu'un informaticien (brillant, certes, mais informaticien). Et l'informaticien, c'est le Mal, selon Alithia. Enfin plutôt un des suppôts de
Satan.
Les billets
Donnons un bref aperçu du plan de chaque billet que je commente un peu, en commençant par l'observatrice (honneur aux dames) :
- Introduction à charge (pas conseillé pour le bac) : premier paragraphe.
- Présentation du fait, mettant en cause Sue Gardner et le fait qu'elle ait engagé Erik Möller. Et mise en parallèle du cas Möller avec celui de Carolyn Doran. Deuxième et troisième
paragraphe. L'attaque envers Sue Gardner est centrale, le reste ne ressemblant qu'à de l'habillage pour faire passer la pilule.
- Deuxième volet de l'attaque envers Sue Gardner, sur un paragraphe. Accusée de corruption (car acheter quelqu'un, c'est synonyme de corruption, en français), rien que ça. A moins qu'il
s'agisse d'un plan machiavélique pour contrôler Erik Möller. On ne sait pas trop en fait.
- Dernier volet (plus sensé en apparence) : on explique que Sue Gardner est devant un dilemne quant au futur de Möller au sein de la structure de la fondation. Mais l'attaque continue.
- On finit par la citation tirée d'un blog (qu'il faudra que j'aille voir un jour), indiquant un lien (illisible), mais c'est certainement Wikipédia qui est à l'origine de cela (cf. son
message d'avertissement à côté de la source). Si Alithia veut contrer Wikipédia (qui on le rappelle, est un projet de la WMF et donc certainement pas une personne morale), il lui suffit donc
d'écrire une URL correctement. Etonnant non ?
Et pour "étayer" définitivement son article, elle cite sa source, pouvant soit-disant être sujette à détournement de la part de Wikipedia (si vous n'y arrivez pas, car le lien a été détourné par wikipedia vers wikipedia). Source que David Monniaux éclaire un peu ... et qui montre qu'Alithia
n'est pas très regardante quand aux outils utilisées. En effet, cette source est d'extrême-droite assumée. Et Alithia est une grande pourfendeuse de l'extrême-droite.
Passons au billet de David Monniaux. David Monniaux se centre bien plus sur le problème mis en exergue. Je vais essayer de faire plus simple que pour Alithia, car David Monniaux est plus long,
et bien plus complet. Et qu'après tout, je ne suis pas obligé de respecter la neutralité, je ne suis pas sur Wikipédia. Même si j'essaie d'être le plus objectif possible. Allons-y.
- Introduction, avec précision de la provenance de la source révélant l'affaire. Cette qualification de la source est extrêmement importante, car participant clairement d'un activisme très
spécifique aux Etats-Unis. Un peu comme si, en France, on comptait sur l'Humanité (respectivement le Figaro) pour faire un compte-rendu objectif d'un symposium du Médef (respectivement des
Jeunesses communistes) ou inversement. Deux premiers paragraphes.
- Appui sur la nature de la source, et de leur politique vis à vis de l'image. Avec un exemple particulier placé dans une perspective ... historique, si l'on peut dire. Il est évident qu'à
autres temps, autres moeurs. Je me demande d'ailleurs ce que l'organisation responsable de cette "révélation" aurait pensé de l'émission d'Arte d'il y a deux ou trois semaines, sur la
libération des moeurs et de l'attitude vis à vis des enfants dans ce cadre dans les années 68, que la morale réprouve aujourd'hui. Ce qui rend au passage les arguments de David Monniaux moins
"spécifiques" à sa personne.
- Une fois la perspective historique établie, avec un rappel de l'épisode Fischer-Cohn Bendit, David Monniaux en vient au noeud du problème, et donc à l'essai publié par Erik Möller qui lui
vaut l'ire américaine. Et il place cet essai dans le cadre des orientations politico-philosophiques de Möller (totalement incompatibles avec les valeurs de l'extrême-droite chrétienne
américaine) sans lui donner d'excuses particulières. Je cite : Il semble que cet essai défend certaines pratiques que la loi française et les lois américaines répriment. Cela a le
mérite d'être clair.
- Quelques réflexions sur la pérennité des écrits sur internet et sur la fouille de poubelles. Simples et connues (il indique que contrairement aux paroles, les écrits restent, et internet
oblige, sont plus faciles à trouver), mais adéquates dans ce contexte.
- Mise en perspective finale, en abordant la question du devenir de Erik Möller au sein de la WMF (restera, restera pas).
En bref, une mise en perspective sans se permettre de donner un jugement péremptoire ... Et en laissant de côté le débat de personnes ou les règlements de compte. Devinez lequel des deux a
ma préférence ?
Les commentaires
Comme dans tout blog, la lecture des commentaires de ces deux billets est aussi instructive sur le public qu'attire lesdits blogs. Commençons par celui de David Monniaux, à l'heure où je
commence à rédiger ce billet. Pour le moment donc, deux commentaires (seulement ?), correspondant à deux interlocuteurs différents. N'apportent pas grand chose, juste un peu de précision ou une
appréciation.
Chez Alithia, c'est très différent, tant sur la forme que sur le fond. Nous avons 8 commentaires, et 3 réponses d'Alithia. Huit commentaires ? Quel succès ! Mais en fait, pas du tout. 7
commentaires (oui vous avez bien lu, sept) viennent de la même personne (Jojo, une identité d'un vandale wikipédien bien connu). Et le huitième n'est pas forcément une personne bien différente,
vu la propension du premier à changer de nom (ce que devrait vérifier de temps en temps Alithia, car pour les gens avertis, ça fait désordre). Commentons les commentaires :
- Commentaire n°1 (Jojo) : une photo, une phrase. Aucun rapport entre la photo (qui est la personne ? N'y a-t-il pas un problème de licence). Pertinence : nulle.
- Commentaire n°2 (gemme pas wiki ki tue) : qualification, suppositions gratuites. Pertinence dans le débat : nulle.
- Commentaire n°3 (Jojo) : un commentaire avec un lien vers le blog d'Alithia. Quel intérêt, puisqu'Alithia a rappelé son appréciation sur la chose. Pertinence : presque nulle.
- Commentaire n°4 (Jojo) : Jojo fait de la pub pour de l'humanitaire (?). Mais bon, on n'est pas à un paradoxe près. Rajoutons qu'il met l'accent sur une soit-disant théorie du complot.
Pertinence : zéro.
- Commentaire n°5 (Jojo) : Jojo rajoute le lien (correct) vers le blog de Vincent Abry, ce qui sabre toute affirmation du genre Wikipédia contrôle le net. Pertinence : 100 %, car mine un
argument alithiesque sans s'en rendre compte.
- Commentaire n°6 (Jojo) : Jojo rapporte l'existence du billet de David Monniaux à Alithia. En faisant quelques insinuations. Pertinence : 100 %, car apporte la contradiction (oui, la pensée
d'Alithia n'est pas unique) et dans le même temps, discrédite un peu plus Jojo.
- Réponse au n°6 d'Alithia : selon elle, David Monniaux raconte n'importe quoi (logique tordue, tentatives de démonstrations perverses dit-elle). Intéressant. Mais pour le moment, elle n'a
rien dit sur le fond de l'affaire qu'elle essaie d'utiliser. Elle demande qu'on ne lui parle plus de David Monniaux. Pertinence : 0 %.
- Commentaire n°7 (Jojo) : Jojo abonde dans le sens d'Alithia, en venant déclarer que les pédophiles et les nazis se sentent chez eux sur wikipédia. A relier avec la "source". Pertinence :
néant.
- Réponse au n°7 d'Alithia : pas la peine d'insister, dit-elle. Oui, la mauvaise foi commence à se voir, rajoute-je. Pertinence : nulle.
- Commentaire n°8 (Jojo) : une photo en citant un article de Wikipédia. Je me demande pourquoi il n'a pas encore comparé l'article Trou
noir à de l'odieuse propagande néo-nazi pédophile. Pertinence : néant.
- Réponse au n°8 d'Alithia : "grotesque". Parle-t-elle des commentaires de Jojo ? Pertinence : indécidable.
En conclusion
Une affaire judiciaire (ou pas encore) montée en épingle peut être révélatrice du manque total d'objectivité d'un observateur revendiqué, qui enchaîne les erreurs les plus grotesques sur le
fonctionnement des projets Wikimedia et de la Foundation. De quoi remettre très sérieusement en cause ses déclarations.